Claude Weisbuch : Vibrations de vie

Dans une glaciale soirée marseillaise, Weisbuch, ascète du trait, tout de noir vêtu, le visage comme sculpté de toutes les expressions d'une vie, illuminait de son art vibrant et passionné l'espace Villeneuve-Bargemon, à deux pas de l'Hôtel de Ville, sur le Vieux-Port.

Escale à Marseille

Car la cité phocéenne (qui sera Capitale européenne de l'art en 2013) rend hommage, durant tout le mois de février, au plus grand des graveurs français, Claude Weisbuch, l'homme du Nord, ancien professeur de gravure, qui remplit l'espace d'exposition (et au vue des dimensions de l'endroit, ce n'était pas chose si aisée) par les envolées de ses musiciens, les ruades de ses chevaux héroïques où les instantanés magiques où il réinvente Molière ou Daumier.

Honoré Daumier, le marseillais, est d'ailleurs à l'honneur puisque c'est l'un des portraits de cet artiste que Weisbuch admire tant, qui a été choisi pour servir d'affiche à cette exceptionnelle exposition.

L'évidence d'une oeuvre

Exceptionnel, le mot n'est pas exagéré devant la force des oeuvres présentées, que ce soit les gravures, classiques ou à la manière noire, les lithographies où le mouvement jaillit de chaque trait comme dans ce portrait d'un groupe de violonistes qui, à la manière de David et de son « Serment de l'armée fait à l'Empereur », brandissent l'archer en signe d'allégence envers un chef d'orchestre prêt à prendre la tête de « ses troupes », ou encore dans les toiles (pour la plupart des grands formats) qui imprègnent durablement l'esprit du visiteur.

Des toiles immenses

Car si beaucoup d'amateurs d'art ont déjà eu le privilège d'admirer les oeuvres papier du peintre, peu ont eu le bonheur de se confronter à ses impressionnantes toiles !

A ce Robespierre qui, dans une posture unique, incarne toute la fierté d'une Révolution Française encore réussie, où à ce Molière s'offrant au public dans un geste généreux d'acteur donnant son coeur, son corps et son âme à la scène.

Hymne au Kabuki

Il faut aussi évoquer le Kabuki, portrait d'un interprète du théâtre épique japonais, immense format (40F) où la tenue et les couleurs se mêlent pour une danse intemporelle où, une fois de plus, la scène, la représentation sont au coeur de l'oeuvre de Weisbuch.

Interpréter...

Interpréter les grands hommes passés pour nous les révéler tel qu'en eux-mêmes, interpréter la musique et la rendre visuelle, le théâtre, la Comedia del'Arte, interpréter le plaideur, lui aussi acteur d'une autre forme de drame, interpréter l'enlèvement des Sabines et saisir la violence, la précipitation, la peur des victimes, la hardiesse des cavaliers, les ponctuations équines, tout en rendant hommage à cette Renaissance flamboyante où l'art était au centre de l'évolution de la société, la guidant et l'accompagnant.

...Pour dire la vie

Car ne vous y trompez pas, si Weisbuch est un artiste classique, son oeuvre est d'abord humaniste, venue du siècle des Lumières pour un chant vibrant d'amour à l'homme et à l'humanité. Car c'est bien ce qui fait le lien entre toutes les oeuvres de Claude Weisbuch, l'énergie, qui se dégage du travail de ce jeune homme de 83 ans, est un hymne permanent à la vie !

© Textes & Photos: Natacha PELLETIER pour PASSION ESTAMPES